« Soldats, je suis content de vous. » Cette phrase et tant d’autres rythment l’épopée napoléonienne et laissent une empreinte durable dans les mémoires.
Pendant ses campagnes d’Italie (1796-1797) et d’Egypte (1798-1799), le général Bonaparte prend César pour modèle. Premier consul (1799-1804) puis empereur (1804-1815), Napoléon s’inspire du Polonais Jean Sobieski, vainqueur des Ottomans en 1683, et du roi de Prusse Frédéric II (1712-1786), dont il rapporte l’épée aux Invalides à Paris après la victoire de Wagram (1809). Son éloquence militaire renforce le moral des troupes et les électrise, mais ne convainc pas les parlementaires lors du coup d’Etat du 18 brumaire. Ses proclamations, destinées à être lues par des officiers devant quelques centaines de soldats, nécessitent des phrases courtes et audibles sur le champ de bataille. Ses discours de guerre, qui paraissent dans la presse, sont publiés intégralement dans le Moniteur universel, journal officiel du régime. Après chaque bataille, les Bulletins de la Grande Armée informent les participants aux combats et le grand public, qui suit ainsi la progression des armées. Même s’ils ne voient pas Napoléon lors de ses proclamations, les soldats savent qu’ils pourront lui parler de façon informelle aux bivouacs. Les références à la « grande nation » de la Révolution, qui exporte ses principes en Europe, s’estompent au profit de la gloire militaire sous l’Empire. Le sens de l’honneur, qui impose le respect de l’adversaire et des pays conquis, est exalté. Fin 1799, désireux de parvenir à la paix civile, le Premier consul exhorte l’Armée de l’Ouest à marcher contre les chouans, qualifiés de « rebelles » : « Des Français stipendiés de l’Angleterre ! Ce ne peuvent être que des hommes sans aveu, sans cœur et sans honneur. » A ses soldats les plus valeureux, il attribue des « armes d’honneur » dès 1800. Ce signe de la reconnaissance individuelle s’étend au monde civil par l’institution de l’ordre de la « Légion d’honneur » en 1802. L’année précédente, l’anniversaire du 14 juillet lui a donné l’occasion de rappeler aux Français l’héritage de la Révolution, à savoir l’abolition de la féodalité : « Un Code civil, mûri par la sage lenteur des discussions, protégera vos propriétés et vos droits. ». Napoléon transforme ses victoires en événements historiques. Le soir du 2 décembre 1805, il comprend que la « Grande Armée » vient de vivre une journée exceptionnelle lors de cette « bataille des trois empereurs » français, autrichien et russe, présents sur le terrain. Il proclame : « Soldats ! Vous êtes les premiers guerriers du monde ! La mémoire de ce jour et de vos exploits sera éternelle. » Le lendemain, l’annonce de la victoire se termine par : « il vous suffira de dire : J’étais à la bataille d’Austerlitz pour que l’on vous réponde : Voilà un brave. » La signature de la paix le 26 décembre est accueillie avec enthousiasme. La victoire donne lieu à l’organisation d’une grande fête à Paris, où la Grande Armée est conviée, car : « Vous avez vu votre Empereur partager avec vous vos périls et vos fatigues ; je veux aussi que vous veniez le voir entouré de la grandeur et de la splendeur qui appartient au souverain du premier peuple de l’univers. ». Lors de sa seconde abdication en 1815, Napoléon rédige un discours testament : « Sauvez l’honneur, l’indépendance des Français ; soyez jusqu’à la fin tels que je vous ai connus depuis vingt ans et vous serez invincibles. » Le gouvernement provisoire interdit cette proclamation.
Loïc Salmon
« Discours de guerre Napoléon Bonaparte », Jacques-Olivier Boudon. Editions Pierre de Taillac, 198 pages, illustrations, 9,90 €.
Source : https://croixdeguerre-valeurmilitaire.fr
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