Section 9 : la Garde donne, sur la terre de France

Réorganiser l’armée

La campagne d’Allemagne de 1813 s’est achevée par un nouveau désastre avec la perte de 60 000 hommes et les ravages du typhus qui déciment les rangs. Toutefois, Napoléon dispose encore de plus de 500 000 soldats à l’instruction et dispersés aux frontières de l’Europe dans les dépôts des régiments. L’Etat-major multiplie les exploits pour réorganiser au plus vite l’armée impériale par la levée des conscrits de 1811, 1812, 1813 et 1814. Ces jeunes gens, souvent d’à peine 18 ans, et inexpérimentés, vont constituer l’essentiel de l’armée de 1814, et 20 000 d’entre eux, appelés par anticipation, seront presque tous versés dans la Jeune Garde. On les nommera les « Marie-Louise », car c’est l’Impératrice, en sa qualité de régente, qui a signé, en fin 1813, leur incorporation sous les drapeaux.

La mort de l’illustre général Walther (24 novembre 1813), commandant les grenadiers à cheval, contraint l’Empereur à réorganiser la cavalerie de la Garde. Le général Charles Lefebvre-Desnouettes prend le commandement de la division légère avec la Jeune Garde, alors que la division de la grosse cavalerie est confiée au général Claude Etienne Guyot avec la Vieille garde. Enfin, 3 régiments d’éclaireurs à 4 escadrons de 250 cavaliers sont créés par décret le 4 décembre 1813. On achète à la hâte 3 000 chevaux. Le 1er janvier 1814, 48 escadrons de la Garde Impériale, soient 12 000 hommes, sont équipés et à cheval. Au cours de l’année 1814, les effectifs de la Garde atteindront un pic de 110 000 hommes. La Garde sera le fer de lance dans tous les engagements.

 

 

 

 

 

L’invasion

L’urgence est sur le front nord-est, mais en fait, partout la Grande Armée recule. A la fin 1813, le maréchal britannique Wellington est rentré en France par les Pyrénées avec 100 000 anglais, espagnols, portugais et siciliens, bousculant les troupes françaises chassées d’Espagne. Par ailleurs, 80 000 autrichiens s’apprêtent à marcher vers la frontière des Alpes. Mais surtout, à l’est, l’armée de Bohème du maréchal Charles Philippe de Schwarzenberg aligne 200 000 soldats. Venant d’Allemagne, l’armée de Silésie du maréchal prussien Leberecht von Blücher compte 80 000 Russes et Prussiens. En seconde ligne, au nord, l’armée du renégat Bernadotte (voir section 8) marche à travers la Belgique à la tête de 160 000 combattants russes.

Début janvier 1814. Ces 3 armées pénètrent sur le sol de France, les frontières ayant cédé de tous les côtés. Avec 75 000 hommes immédiatement disponibles côté français, la supériorité des coalisés à 4 contre 1 est immense. Napoléon affiche d’emblée sa volonté d’adopter une approche de guerre de mouvement. Utilisant sa connaissance du terrain et ses talents de stratège, il va tenter de battre chacune des armées de la coalition séparément en évitant toute confrontation directe et massive.

Partout le péril grandit. Face à ces troupes imposantes, Napoléon, qui commande ses unités depuis Paris, ordonne le repli général. Tous les corps d’armée reculent face à un ennemi déterminé et avançant prudemment. Les recrues de la Jeune Garde engluées dans les chemins inondés souffrent de l’humidité, du froid et de la faim. Le ravitaillement est inexistant. Le 12 janvier, la maréchal Mortier à la tête de la Vieille Garde s’empare de la ville de Langres menacée par la pointe d’avant-garde de l’armée de Schwarzenberg. Au soir, un détachement de 300 grenadiers et chasseurs part en mission de reconnaissance vers l’est de la ville alors que la concentration ennemie ne cesse de s’amplifier sur les hauteurs. En pleine nuit, une centaine de fantassins s’infiltrent dans le village de Chatenay à 10 km de Langres, pulvérisant un détachement d’Autrichiens avant de décrocher vers leur point de départ.

Mais au petit matin du 13, Mortier constate que l’ennemi devant lui se renforce considérablement. Le 16 janvier, toute l’Armée de Bohème se met en mouvement vers l’ouest à partir de Vesoul. La Vieille Garde évacue Langres pour éviter un encerclement. Effectivement, les Autrichiens s’empareront de la ville dans la nuit. Fort de ce succès, l’ennemi se rue vers Chaumont, décidé à s’en emparer avant le 18. Mais la Vieille Garde, l’ayant devancé, réussit à repousser les premières troupes autrichiennes. Pour autant, la situation de Mortier est grave. Le corps d’armée de Victor a été contraint de reculer jusqu’à Saint-Dizier et il ne peut espérer aucun renfort alors que ses 6 000 hommes sont face à 45 escadrons autrichiens. La Vieille Garde, épuisée et affamée, évacue Chaumont sans encombre le 19 janvier et arrive à Bar-sur-Aube le 20 pour un repos de 4 jours.

 

 

Les coups d’éclat de la Garde à Brienne et la Rothière

Le 25 janvier à l’aube, l’Empereur, à Paris, part pour Châlons-sur-Marne. Les nouvelles sont de plus en plus mauvaises. Schwarzenberg se dirige vers Troyes et Blücher qui vient d’arriver à Saint-Dizier, s’avance vers l’Aube. Napoléon pense maintenant que les 2 armées vont commencer leur marche vers Paris. Le 26 janvier, l’Empereur arrivé à Vitry-le-François, prend directement le commandement des opérations en ayant sous la main les corps d’armée repliés sur la Marne et l’Aube. Dès le lendemain, les mamelouks chargent les cosaques d’un corps russe installé à Saint-Dizier. La campagne de France s’engage. Cette bien mince victoire a néanmoins pour effet d’avoir coupé en deux l’armée de Silésie. Napoléon en profite pour poursuivre Blücher qui rétrograde sur Brienne. Le 29, il se retranche dans la ville au moment où les français débouchent et attaquent en 3 colonnes. La Garde est là, enthousiaste, la confiance retrouvée par une bienveillance inattendue et même des acclamations des populations des villages traversés. Ereintés, les grognards sont soignés, nourris, chauffés, aidés à désembourber les pièces d’artillerie engluées dans la boue blanchâtre de Champagne. A la nuit, les voltigeurs de la Garde, au côté du 2eme corps, investissent les rues de Brienne en toute discrétion jusqu’au château, où Blücher et son état-major dînent … au Champagne ! Surpris, les officiers s’échappent en sauve qui peut dans la nuit. Sauvé in-extremis, Blücher lance toute son infanterie disponible sur Brienne pour reconquérir le château. Un terrible combat de nuit s’engage jusqu’à minuit, alors que les prussiens décrochent devant la ruée des soldats français. L’Empereur, ayant frôlé la mort lors d’une embuscade tendue par un petit groupe de cosaques, rejoint la Garde qui bivouaque auprès de grands feux autour du village de Maizières, à 6 km au nord-est de Brienne. Mais il ne peut continuer sa marche sur Troyes car le corps d’armée du maréchal Marmont est toujours isolé à Joinville (90 km à l’est de Troyes). Napoléon décide de prendre une position défensive en avant de Brienne pour gagner le temps nécessaire au regroupement de ses troupes.

L’Empereur, disposant de 35 000 hommes, cherche désormais à retarder l’avancée des coalisés tout en préservant ses forces pour de futurs engagements plus décisifs. La Rothière, petit village à 5 km de Brienne va devenir le point de convergence des armées ennemies de Silésie et de Bohême, avec leurs 165 000 hommes. Le choc a lieu le 1er février sous une tempête de neige. Napoléon, conscient de la disproportion des effectifs veut éviter la bataille, mais il en est contraint pour empêcher le dépoilement des coalisés. Aussi, va-t-il compenser son infériorité numérique en utilisant les villages comme point d’appui, dont La Rothière, goulet d’étranglement sur leur trajectoire. A partir du village, les cavaliers de la Garde aux ordres du général Etienne de Nansouty balaye de la plaine les escadrons ennemis avant de se replier face à une puissante riposte russe. Mais, ailleurs, le front craque de partout, Napoléon lance 2 divisions de la Jeune Garde avec le maréchal Oudinot vers La Rothière en flammes, et la division du général Joseph Meunier au secours des corps d’armée de Victor et de Marmont en grand danger. La Jeune Garde reprend la Rothière à la baïonnette, tandis que Meunier stoppe l’offensive des bavarois. La situation provisoirement rétablie, l’Empereur peut entamer dans l’ordre le repli de ses troupes vers Brienne et le nord, héroïquement couvert par la Jeune Garde qui parvient à contenir les offensives de l’adversaire. Vers 22 heures, elle décroche des ruines fumantes. Napoléon vient d’échapper à la destruction complète. Le général Jean Joseph Marguet de la Jeune Garde compte parmi les 800 tués. Ses jeunes troupes ont fait merveille.

L’offensive éclair des « 6 jours »

A partir du 4 février 1814, Napoléon va tirer parti de la dispersion des corps d’armée de Blücher en lançant une série d’offensives éclairs qui resteront dans l’Histoire sous le nom de « Campagne des 6 jours », du 10 au 15 février. Les forces de Blücher dispersées rendront son armée vulnérable à des attaques ciblées.

L’Empereur, en s’appuyant sur la Garde Impériale, exploitera cette faille en attaquant les corps d’armée ennemis isolés les uns après les autres.

La bataille de Champaubert, le 10 février, marque l’ouverture de cette remarquable série de batailles. La séparation des armées de Blücher marchant vers Meaux et de Schwarzenberg progressant vers Paris, par Troyes, laisse les 5 000 hommes du corps russe du général Zakhar Olsufiev dangereusement isolés. L’armée française avec 10 000 hommes dont 2 000 cavaliers arrivent au contact des forces d’Olsufiev tôt le matin. L’infanterie de Marmont renforcée par la Jeune Garde s’emparent du plateau de Champaubert et étrille les forces ennemies s’accrochant désespérément à ses positions. Les cuirassiers du général Etienne de Bordesoulle les contournent, puis surgissent en enfonçant les carrés russes. La plupart des fuyards tentent de gagner Champaubert, mais le maréchal Emmanuel de Grouchy, à la tête de sa cavalerie légère, les rattrape et les taille en pièces. Les rares troupes russes fuyant sur Etoges sont surprises et rompues par les cuirassiers et l’infanterie du général Joseph Lagrange. Au soir, le corps d’armée d’Olsufiev n’existe plus : les pertes s’élèvent entre 2500 et 4 000 hommes. Olsifiev et 40 généraux sont faits prisonniers.

Sans laisser le moindre répit à l’adversaire, Napoléon, avec 16 000 hommes, décide de se retourner habilement, le 11 février, contre le corps d’armée russe du général Fabian von der Osten-Sacken, puis celui du général prussien Ludwig Yorck qui convergent vers Montmirail, à 15 km à l’ouest de Champaubert. L’opportunité qui se présente est de taille car l’Empereur va se retourner sur leurs arrières et va pouvoir les frapper dans le dos en maximisant les chances de réussite grâce à l’emploi soutenu de la Garde Impériale. En effet, aux côtés de la 8e division (général Etienne Ricard) du 6e corps, la Garde déploie la puissance du corps d’armée du maréchal Mortier avec les divisions Friant et Michel (Vieille garde), la division de cavalerie Defrance (gardes d’honneur), la cavalerie de la Garde Impériale des généraux de Nansouty, Lesvèque de Laferrière et 36 canons. Napoléon arrive à 8 heures du matin à Montmirail, précédé par les cavaliers de Nansouty accompagnés par quelques escadrons de la Garde et par une partie de la 8e division du 6e corps. Face à la supériorité numérique de l’adversaire, l’Empereur décide d’attendre l’arrivée des troupes encore en arrière avant de débuter l’attaque.

À 10 heures, la Vieille Garde et le reste de la 8e se présentent à Montmirail. La bataille s’engage par une succession d’attaques et de contre-attaques.  La Vieille Garde de Friant menace d’être submergée par la masse ennemie. En milieu d’après-midi, l’arrivée de Mortier avec la division Michel de la Vieille Garde et la cavalerie de Defrance décide l’Empereur à lancer la charge sur Otto-Sacken. Le général Dautancourt, qui commande les dragons de la Vieille Garde perfore les lignes russes. L’ennemi, surpris par la rapidité de l’attaque, se replie en désordre dans les bois à proximité. Les dragons de Dautancourt, dans une magnifique attaque au cri de « Vive l’Empereur ! », se lance à la poursuite des fuyards, les rattrapent et les pulvérisent. Entretemps, l’infanterie française refoule les Russes au-delà de la ligne de front, et les Prussiens de Yorck, arrivés tardivement sur le champ de bataille, ne peuvent empêcher la victoire française. À la fin de la journée, les dragons de la Vieille Garde ont perdu « seulement » 6 tués et autant de blessés. De leur côté, les dragons de la Jeune Garde du général Letort de Lorville, chargent les fantassins russes en débandade vers Epernay où ils sont impitoyablement sabrés. Letort de Lorville est nommé général de division sur le champ de bataille le jour même. La contre-attaque de Michel, appuyée par la cavalerie, rompt l’offensive des troupes de Yorck, qui, au prix de lourdes pertes, se retirent après avoir perdu un millier des leurs. Le soir à Montmirail, qualifié d’« Austerlitz champenois », l’Empereur déclare : « Ma Garde à pied et à cheval s’est couverte de gloire […]. Ce qu’ils (les dragons) ont fait ne peut se comparer qu’aux romans de chevalerie et aux hommes d’armes dans ces temps où, par l’effet de leurs armures et l’adresse de leurs chevaux, un en battait trois ou quatre cents ».

A Montmirail, la Vieille Garde réalisera l’un de ses plus glorieux fait d’armes.

La Garde au complet, c’est à dire l’infanterie, la cavalerie et l’artillerie sous le commandement respectif du maréchal Ney, du général de Nansouty et du général Drouot se couvrira de gloire, le 14 février, la bataille de Vauchamps, en infligeant une nouvelle défaite à Blücher par la fougue, la rapidité, la détermination et le talent.

Pourtant, le génie militaire de Napoléon, le courage, le dévouement et l’engagement total des soldats de la Garde Impériale ne pourront plus compenser bien longtemps la fragilité de la situation. Malgré d’indéniables succès, la Grande Armée a de plus en plus de mal à vaincre les armées de la coalition individuellement.

Après ses victoires, Napoléon va se retourner vers l’armée autrichienne de Schwarzenberg dangereusement avancée sur la route de Paris. Provisoirement, la Garde, jeune et vieille, reprend un rôle de réserve lors de l’offensive tous azimuts lancée le 17 février.

C’est alors que l’Empereur à l’idée de foncer sur Montereau (sur l’Yonne) pour envelopper l’aile gauche de Schwarzenberg. Les troupes de la coalition, menant une résistance acharnée, réussissent à repousser les attaques françaises pendant une grande partie de la journée du 18. Mais peu à peu, les charges de cavalerie repoussent l’ennemi vers les faubourgs jusqu’à une retraite généralisée. Elle se mue en déroute sous une ruée de l’infanterie de la Garde qui arrive au pas de course derrière les cavaliers. La colonne infernale franchit les ponts de l’Yonne, sabrant et piétinant tout sur son passage malgré la fusillade fournie des bataillons autrichiens. Napoléon, du haut du plateau de Surville dominant les ponts, ne perd rien du spectacle. Pour achever les fuyards entassés sur la chaussée, il pointe lui-même la première pièce des 2 batteries d’artillerie à cheval de la Garde et canonne les autrichiens en déroute.

La bataille de Montereau est une victoire, mais les renforts ennemis arrivent sans cesse de l’est et leur coordination progresse. A la fin février, Napoléon marche sur les arrières de Blücher, et Schwarzenberg, sur ceux de Napoléon ! La Garde, au moral remonté par les récentes victoires, est dispersée partout où il faut taper sur les détachements encore isolés de l’adversaire, sur les ponts de la Seine et de l’Aube. Le 27 février, Marmont et Mortier avec un détachement interarmes de la Garde repoussent les cosaques au niveau de Meaux puis se portent sur la rivière Ourcq, dont ils interdisent l’accès aux Prussiens pour couvrir Paris. Mais le déséquilibre des forces ne cesse de grandir.

Le vrai tournant de la campagne

Le temps presse. A partir du 27 février, l’armée de Bohême bouscule les faibles forces du maréchal Oudinot à Bar-sur-Aube. L’armée de Silésie, échappant en désordre au piège tendu par Mortier et Marmont sur l’Ourcq, parvient néanmoins à se regrouper à Soissons le 3 mars, l’Empereur, à la tête de sa Garde n’ayant pu lui couper la retraite. Dès le 4 mars, une course de vitesse s’engage entre Blücher voulant concentrer 100 000 hommes à Laon, formidable forteresse naturelle, et Napoléon cherchant à neutraliser l’armée prussienne, afin de pouvoir se retourner une nouvelle fois contre l’armée de Schwarzenberg. Le 7 mars, après une nuit de pluie et de gel, la cavalerie de la Garde et une partie de son artillerie s’engage sur le plateau de Craonne de part et d’autre d’un certain Chemin des Dames. Alors que la division des grenadiers à pied (général Louis Friant) et celle des chasseurs à pied (général Joseph Boyer de Rébeval) sont cloués sur place par l’artillerie russe, l’infanterie de la Garde débouche sur le plateau enfonçant les arrières de l’infanterie ennemie dans une cohue indescriptible. La bataille de Craonne se termine par une victoire, mais les français sont épuisés.

Le 11 mars, l’Empereur rentre dans Soissons avec la Vieille Garde. Avec la neige tombée les derniers jours, les rues couvertes de fumier sont transformées en cloaque dans lequel les chevaux s’enfoncent jusqu’au jarret. L’Empereur est triste et inquiet, se heurtant à la dure réalité du nombre dans la défaite à Laon deux jours plus tôt. En effet, les assauts furieux de l’infanterie, les charges de cavalerie, l’héroïsme des 60 fantassins de la Vieille Garde reprenant une position ennemie à la baïonnette pour couvrir la retraite des éléments de Marmont n’arriveront pas à prendre le dessus dans la ville.

On estime à 9 000 tués et blessés les pertes françaises, dont 3 000 à la Garde avec presque tous ses généraux mis hors de combat. Une rapide réorganisation s’opère. Le général Sébastiani prend la tête des 3 divisions de cavalerie de la Garde (généraux Colbert, Exelmans et Letort). Aussi grave qu’est la situation et malgré « les malheurs de la Patrie », la volonté de la Vieille Garde de la sauver est intact : « On vaincra, ou on y restera ».

 L’Empereur reprenant la campagne, va accourir au secours de Reims récemment occupés par les Prussiens et les Russes.

Le 13 mars, à 2 heures du matin, il s’engage sur la route de Reims avec toute la cavalerie, la vieille Garde de Friant, la réserve d’Artillerie de Drouot, et le corps d’armée de Marmont, en avant-garde, soient 13 500 hommes.

Les troupes russes et prussiennes surprises au bivouac tentent une vaine résistance. A 16 heures, la cavalerie française, dans un mouvement tournant, balaye la cavalerie ennemie qu’elle sabre, ainsi que l’artillerie empêtrée dans les faubourgs de la ville. La résistance ennemie faiblit progressivement devant les assauts furieux des 3e et 4e régiments de gardes d’honneur et des troupes de Marmont. Au soir, lanciers polonais, éclaireurs et dragons d’Exelmans pénètrent dans la ville au milieu des flammes.

Reims sera la dernière victoire, et peut-être l’Empereur le sait-il déjà, en ce 15 mars, à 3 heures de l’après-midi lorsqu’il monte à cheval pour une ultime revue de la Garde aux tenues élimées, dépourvues de la couche de boue recouvrant les culottes et les bottes. « Les vieilles gueules ridées sont rasées de frais, les chevaux toilettés ».  Au cri de « Vive l’Empereur », les grognards manifestent confiance et enthousiasme, mais très vite, la gravité de la situation les ramène à la terrible réalité. Avec 15 000 hommes accourus de toute part et regroupés à la hâte, la Garde, devenue l’instrument principal et décisif de la guerre, l’Empereur va désespérément tenter de bousculer Schwarzenberg sur l’Aube avec les 3 divisions de cavalerie de Sébastiani, tout en contenant Blücher sur l’Aisne avec Mortier, les grenadiers et les chasseurs à pied aux côtés de la cavalerie de la Ligne. La Garde prend la direction du sud-est, s’empare de Châlons-sur-Marne le 15 mars et atteint la région d’Arcis-sur Aube (25 km nord de Troyes) le 19. Mais Schwarzenberg cesse son mouvement de repli, réunit ses forces et contre-attaque avec 100 000 hommes les 23 000 hommes de Napoléon. La cavalerie de Sébastiani, partie en reconnaissance sur le plateau au sud d’Arcis-sur Aube, se heurte à d’innombrables escadrons ennemis qui la mettent en déroute. L’Empereur lui-même, son épée à la main et entouré de sa Garde, arrête le recul de ses troupes au niveau du pont sur l’Aube au centre de la ville, alors que l’infanterie polonaise de la Garde contient les cavaliers ennemis. Charges et contre-charges se succèdent jusqu’au soir, sans résultat décisif. Le 21 mars, Napoléon diminué et très éloigné de Paris tente un nouveau pari stratégique audacieux : marcher sur la Lorraine et le Rhin pour attaquer les arrières de l’ennemi, semer le chaos dans ses lignes d’approvisionnement et l’inciter à un repli général vers l’est.  Malheureusement, les coalisés ayant eu connaissance de la manœuvre, marchent vers Paris. Napoléon, avec la Vieille Garde, les mameluks, les lanciers et les chasseurs à cheval de Colbert va bousculer les Russes à Saint-Dizier le 26 mars, mais comprenant l’imminence du danger, décide à son tour de rallier Paris. Entre-temps, le rouleau compresseur allié de 200 000 hommes tombera, le 25 mars, près de Fère Champenoise (30 km sud-ouest Châlons), sur les 15 000 soldats de Marmont et Mortier qui cherchaient à rejoindre Napoléon. Après une lutte héroïque, ils n’échapperont que de justesse au désastre et parviendront à rejoindre la capitale.

C’est au cours des batailles de 1814 que la Garde a le plus souvent donné. Plus de la moitié des officiers de la Garde tués entre 1800 et 1814 l’ont été pendant la campagne de France. Partout, la Garde s’est distinguée avec courage et dévouement. Mais bien que valeureuse, elle ne peut cependant plus lutter indéfiniment contre la disproportion des forces.

….. Il est 4h30 du matin, en ce 30 mars 1814, lorsque les cloches de la cathédrale saint-Pierre de Troyes sonnent lorsque l’Empereur et la Garde quittent Troyes pour une course de 150 km jusqu’à Paris. Tard en soirée, la nouvelle court dans les rangs des cavaliers en approche de Juvisy : Paris s’est rendu !

 

Christian LE MELINER 

 

A suivre, section 10 : « Les volontaires de la fidélité »

 « Ils grognaient et le suivaient toujours », par Auguste RAFFET (1836)

 

Sources : « La Garde impériale » – Commandant Henry LACHOUQUE – édition LAVAUZELLE – 1982 ;

« Le Consulat et l’Empire » – Jean-Paul BERTAUD – A. COLIN – édition 2021 ;

                « L’art militaire de Napoléon » – Jacques GARNIER – édition PERRIN – 2015 ;

Dictionnaire d’Histoire de France – sous la direction de Alain DECAUX de l’Académie française et André CASTELOT – librairie académique Perrin – 1981 ;

Encyclopédie WIKIPEDIA.

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